28 février 2020

Intrapreneuriat, effet de mode ou réel levier d’innovation et de performance ? L’EN3S propose d’analyser le phénomène et d’échanger les expériences.

Intrapreneuriat, à la lecture de ce néologisme on saisit intuitivement qu’il s’agit de transformer les méthodes de travail dans une logique d’encouragement des « comportements d’entrepreneurs » au sein d’une structure, de transformation vers des approches plus agiles…

Cette nouvelle manière de travailler relève-t-elle de l’effet de mode ? Est-elle pertinente dans la sphère publique et plus particulièrement dans les organismes de Sécurité sociale ?  L’ampleur du phénomène amène certaines branches à expérimenter cette démarche dans leur programme d’innovation.

Afin d’explorer ce sujet plus en profondeur et de déterminer s’il constitue une opportunité dans la transformation des organismes de Sécurité sociale, une recherche-action sur cette thématique a été confiée à un groupe d’élèves de la 58ème promotion. Leurs travaux ont été dirigés par Elsa Parlange, directrice de l’innovation à la Cnav.

Sébastien Dufour, élève de la 58ème promotion et chef de projet de cette recherche-action, revient sur leur analyse du phénomène consignée dans leur rapport de recherche-action.

Qu’est-ce que l’intrapreneuriat ?

L’intrapreneuriat permet le développement de bout en bout d’un projet novateur par un salarié au sein même de son entreprise avec l’accord et le soutien de sa direction.

L’intrapreneur est, en quelque sorte, un entrepreneur volontaire et salarié, dont l’idée d’un projet profitable à son entreprise est validée par sa direction. L’état d’esprit de l’intrapreneur rejoint celui de l’entrepreneur en ce qu’il veut agir pour changer l’existant, résoudre un problème ou créer quelque chose de nouveau. L’intrapreneur conjugue ainsi la capacité à innover et le caractère proactif de l’initiative.

Le périmètre de l’intrapreneuriat est large : les projets d’intrapreneuriat peuvent concerner de nouveaux produits, nouveaux services, nouveaux processus ou nouvelles activités dans tous les domaines de l’organisation.

Cette approche organisationnelle est apparue dans le monde de l’entreprise, est-elle transposable dans les services publics ? A quelle attente, à quel besoin répondrait-elle dans la sphère publique ?

On constate que les entreprises les plus engagées dans la démarche intrapreneuriale sont celles qui évoluent dans un environnement fortement concurrentiel (industries, banques, etc.). Toutefois, la réflexion autour de la mise en place de la démarche par les opérateurs de services publics se justifie aujourd’hui par les enjeux de qualité du service rendu aux usagers et d’efficience des activités.

Ainsi, l’intrapreneuriat apparaît à un nombre croissant d’organismes évoluant dans la sphère publique comme un levier de créativité et d’innovation au profit de leurs salariés et de leurs usagers. Un projet intrapreneurial est l’une des solutions possibles à l’optimisation de la performance et à l’amélioration d’un service. Il permet notamment de transformer des idées en projet pour les conduire à maturité le plus rapidement possible.

Des dynamiques intrapreneuriales ont pris forme au sein de la Sécurité sociale, notamment depuis la création de directions de l’innovation au sein des caisses nationales. Les spécificités des organismes de Sécurité sociale impliquent une adaptation de cet « outil » pour qu’il devienne réellement efficace et diffuse une culture d’innovation au sein des réseaux. En effet, le caractère polymorphe de l’intrapreneuriat permet à chaque organisation d’inventer le modèle le plus adapté à ses besoins et son environnement.

Dans votre rapport, vous formulez des préconisations, voire des préalables à son développement. Pourriez-vous nous en présenter trois qui sont ressortis comme majeurs ?

A travers l’étude de quelques cas d’usage, aussi bien issus du secteur lucratif que d’organismes de Sécurité sociale, nous avons identifié des clés de réussite afin de mener à bien une démarche intrapreneuriale. Parmi celles-ci, trois recommandations peuvent être soulignées :

L’expérience démontre que l’acculturation s’avère nécessaire à tous les échelons des organismes locaux avec un appui fort des caisses nationales. Le portage de la démarche au plus haut niveau constitue un prérequis essentiel.

L’accompagnement de l’intrapreneur doit favoriser l’autonomie et le management agile : l’intrapreneur est un collaborateur dont une partie du temps de travail est détachée sur un projet qu’il porte, seul ou en équipe, de manière autonome et agile. Il convient de lui garantir une liberté quant à la manière de mener son projet et d’utiliser les moyens (méthodologie, temps, argent, …) qui lui sont accordés.

Une communication adaptée doit accompagner la démarche intrapreneuriale et un dispositif d’évaluation doit permettre d’en mesurer l’efficacité. La communication tout au long du processus doit permettre de valoriser les projets et d’associer l’ensemble des collaborateurs. Ainsi, un réseau d’ambassadeurs peut utilement être formé autour du dispositif. De plus, une évaluation tant qualitative que quantitative devra être conduite au cours du projet ainsi qu’à son terme pour déterminer la pertinence de la poursuite de la démarche et les ajustements nécessaires.

L’intrapreneuriat suscite engouement ou réticence mais le concept laisse rarement indifférents les experts innovation et RH. Ainsi, afin de partager les points de vue et expériences en la matière, l’intrapreneuriat sera l’objet d’une session du cercle des directeurs le 5 mars 2020 qui se tiendra au schoolab avec un partage d’expérience d’ENEDIS et de la Société générale.

Consulter le rapport de recherche-action dans son exhaustivité sur Secudoc.fr