21 janvier 2022

Diplôme Universitaire GEOSS EN3S – Paris 1 La Sorbonne : un cycle de classes virtuelles dédié à l’extension de la couverture sociale en préformation à distance

 

Après une ouverture officielle du DU GEOSS par Christine Neau-Leduc, Présidente de l’Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne, et Dominique Libault, Directeur de l’EN3S, les participants au Diplôme Universitaire en Gestion des organismes de sécurité sociale ont pris part à une série de classes virtuelles dédiée à l’extension de la couverture du 11 au 20 janvier 2022, où ont été abordés :

  • Les fondements de la protection sociale et les stratégies pour son extension
  • L’extension de la couverture santé illustrée par le cas du Rwanda, primé par l’Association Internationale de Sécurité Sociale en 2019 pour être parvenu à instaurer une couverture quasi universelle en moins de 20 ans
  • Les défis et stratégies pour l’extension de la couverture aux travailleurs du secteur informel
  • L’acculturation à la protection sociale
  • Le financement de l’extension de la couverture, à travers une étude menée au Sénégal sur l’analyse des espaces budgétaires, les options de financement et les impacts des investissements en protection sociale ; l’occasion de faire un focus sur ce travail concret, riche en enseignements.

Zoom sur l’étude consacrée au « Financement de la protection sociale au Sénégal »

Commanditée par la Délégation générale à la protection sociale et à la solidarité nationale du Sénégal (DGPSN), avec le soutien technique de l’OIT, l’étude finalisée en 2021 a permis de démontrer concrètement aux participants la méthodologie d’étude du financement de la protection sociale.

Ces travaux, financés par l’Union Européenne, analysent plus particulièrement les ressources mobilisables, les options de financement retenues à l’issue du dialogue social et enfin, mettent en exergue les impacts des investissements en protection sociale.

 

Moussa DiengMoussa Dieng, Expert senior et Coordonnateur national du projet synergies entre la protection sociale et la gestion des finances publiques pour l’OIT, a coordonné cette étude financée par l’Union Européenne. Il est intervenu lors de cette présentation avec Alix Machiels, Experte associée en protection sociale à l’OIT à Dakar ; l’occasion de leur poser quelques questions.

Dans quel contexte, cette étude a-t-elle été entreprise ?

Le gouvernement du Sénégal a fait de l’extension et du renforcement de la Protection sociale un élément fondamental de sa stratégie de développement économique et social, en la considérant comme un investissement et non plus comme une charge.

Pour contribuer à la mise en œuvre des orientations stratégiques du Plan Sénégal Émergent (PSE), la Stratégie Nationale de Protection Sociale 2016 -2035 (SNPS) a été élaborée avec pour vision de doter le pays d’un système de protection sociale inclusif, solidement ancré dans la culture nationale et garanti par l’État à travers des lois d’ici 2035.

Un des défis prioritaires pour la mise en œuvre de la SNPS dans le moyen terme est la sécurisation des ressources, et ce pour deux raisons :

  • Tout d’abord, la part importante de la population sous le seuil de la pauvreté, exerce et continuera d’exercer une pression à la hausse sur les dépenses sociales;
  • La réalisation des objectifs de la SNPS et sa mise en œuvre effective nécessite la mise en place de nombreux programmes d’extension, en vue d’instaurer progressivement un socle de protection sociale au Sénégal.

Cela requiert l’existence d’un mécanisme de financement durable et soutenable des dépenses de Protection sociale, particulièrement pour les programmes non contributifs. Les ressources financières allouées aux programmes publics de protection sociale devront atteindre au moins 7 % du PIB à terme.

 Quels sont les grands axes de cette étude ?

L’étude part de l’idée qu’il est possible au Sénégal de disposer d’un portefeuille d’interventions constituant un socle de Protection sociale, qui vise à assurer un niveau minimum de couverture sociale à un coût supportable pour l’État, et qui constituerait une plateforme permettant l’instauration progressive d’un régime complet de Protection sociale.  

Elle examine un large éventail de sources de financement et évalue les ressources mobilisables tout en prenant en compte les répercussions des différentes options sur la soutenabilité du budget et de la dette de l’État, la stabilité macroéconomique et les inégalités.

Elle analyse la rentabilité des investissements en protection sociale en mettant en lumière les effets attendus des efforts que le Gouvernement et les partenaires au développement envisagent pour renforcer l’accès des ménages à la protection sociale. Car, si la définition d’un espace budgétaire est importante pour s’assurer de la faisabilité et de la soutenabilité d’un programme de Protection sociale, il est tout aussi important de connaitre les impacts qu’un tel programme aura sur l’économie nationale et le bienêtre des populations avant sa mise en œuvre. Connaitre les effets de ses différentes composantes, selon les différentes options de financement disponibles, permet d’éclairer à la fois sur le choix des programmes et les modes de financement.

Quelles sont les grandes options de financement qui ont été retenues comme hypothèses de travail ?

Tirant les enseignements des expériences passées en revue et des caractéristiques majeures des finances publiques sénégalaises, trois grandes options de financement public de la protection sociale ont été retenues dans l’étude :

  • la réaffectation de dépenses publiques, en remplaçant les investissements à coût élevé ou à faible impact par d’autres ayant un impact social plus important. Actuellement, une faible part du budget est alloué aux prestations sociales, environ 6%. Il est possible de mobiliser davantage de ressources pour financer les dépenses sociales par la réduction ou la suppression des subventions allouées, notamment celles concernant le carburant.
  • l’augmentation des recettes fiscales, en élargissant l’assiette fiscale par une hausse des taux d’imposition ou par une amélioration de l’efficacité de la couverture fiscale. Les recettes intérieures constituent la source la plus stable de financement du développement, et un consensus s’est dégagé sur la nécessité de renforcer les efforts fiscaux à cette fin (la pression fiscale au Sénégal est relativement faible, 19,3% en 2019). Il est proposé d’augmenter la contribution sur les télécommunications, les ressources naturelles et la TVA sociale (de 18 à 19%).
  • l’extension de la couverture de sécurité sociale aux actifs de l’économie informelle, en mobilisant notamment la contribution des ménages non couverts à la Couverture Maladie Universelle via leur adhésion aux mutuelles et en proposant un programme de pension de retraite aux actifs de l’économie informelle.

Au total, 20 mesures ont été identifiées. Des mesures retenues, l’élimination des dépenses fiscales, la TVA sociale, les taxes sur les produits pétroliers, les taxes sur les jeux de hasard et sur les produits importés de grande consommation contribuent le plus aux ressources additionnelles pour le financement de la protection sociale.

Leur application ferait passer le volume de ressources mobilisables pour le programme de protection sociale de 222 milliards de francs à 519,6 milliards de francs en 2019 (première année) pour atteindre 1 917,40 milliards en 2035, soit une multiplication par 2,8. De tels résultats montrent que le Sénégal dispose d’importantes marges pour augmenter ses ressources propres et financer davantage la protection sociale.

En quelques mots, quels sont les facteurs clés de la réussite de cette démarche ?

Pour aboutir, une telle démarche doit s’appuyer sur :  

  • L’appui politique pour investir dans la protection sociale;
  • L’étude d’un espace budgétaire sur le long terme;
  • La mesure des retombées escomptées des investissements dans la couverture sociale sur la société pour éclairer la prise de décision;
  • Et enfin, l’association de tous acteurs concernés au projet (gouvernement, employeurs, travailleurs, société civile, ONG…) et la construction d’un vrai dialogue social national, fondamental pour adopter la combinaison optimale de politiques publiques pour l’emploi et la protection sociale, et susciter l’adhésion.

 

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