15 mai 2024

Des formules à la carte à la CAF du Var : le point avec Julien Orlandini


Depuis le lundi 8 janvier, après une négociation sociale et la signature par l’ensemble des organisations syndicales d’un accord d’expérimentation, la CAF du Var a lancé de nouvelles modalités d’organisation du travail pour ses collaborateurs. Julien Orlandini fait le point auprès de l’EN3S pour nous éclairer sur cette démarche inédite.

 

 

Pouvez-vous nous expliquer les principales motivations qui ont conduit à la mise en place de cette nouvelle organisation des rythmes de travail à la CAF du Var ?

Julien Orlandini : C’est simplement une réponse à une demande exprimée nettement par nos salarié.e.s lors de l’évaluation d’impact de notre projet d’entreprise 2018-2022. Elle a été réitérée lors du lancement de notre nouveau projet d’entreprise Imp’Act qui , comme le précédent, a été élaboré avec les équipes de manière entièrement collaborative. Nous avons en effet organisé un challenge RSO avec chaque service en 2023 et plusieurs des propositions ont porté sur la mise en œuvre la semaine en 4 jours et la flexibilité horaire. 

Cela est bien sûr rentré en pleine cohérence avec notre dynamique RSO et d’adaptation régulière au « client interne ». C’est aussi une suite logique d’une transformation des modes et formes de travail à la Caf du Var puisque nous avons toujours considéré que la performance passait par la confiance et par le sentiment d’autonomie. 

C’est enfin congruent avec le fait de penser obligation de résultat plus que de moyens et de prendre en compte les aspirations et les conciliations de vie. Et nous avions l’envie d’accompagner l’entrée dans un nouveau siège fin 2024, de nouveaux espaces, par cette évolution des rythmes de travail. D’autant que la mobilité n’est parfois pas aisée sur ce territoire et la souplesse horaire peut amener des solutions aux bouchons réguliers de la métropole toulonnaise… !

 

Du coup, en quoi consiste concrètement cette nouvelle organisation, notamment les différentes formules proposées aux collaborateurs ?

Julien Orlandini : Sa spécificité réside dans le fait que plusieurs formules sont proposées, d’abord dans le cadre d’un expérimentation: semaine en 4 jours (et 36h), semaine en 4 jours et demi (et 39h), horaires souples c’est à dire horaires variables à 100%, en contrepartie de maintien de régulations et notamment d’une durée minimum de travail quotidienne. Avec une extension des plages horaires de travail le matin et le soir et la suppression des récupérations d’heures au badge. 

En revanche nous avons fixé dès le départ des principes et régulations incontournables : la continuité de service, en particulier du service au public, la soutenabilité pour les managers, le maintien de la cohésion.

 

Comment cette décision a-t-elle été prise et quelles ont été les étapes clé du processus de mise en œuvre de ce nouveau modèle organisationnel ?

Julien Orlandini : Nous avons choisi le format d’une expérimentation sur la base d’un accord négocié et signé avec l’ensemble des organisations syndicales et que le Comex de l’UCANSS a validé. Bien entendu, nous avions aussi échangé avec la CNAF en amont vu l’impact potentiel du projet. 

Le format de nos expérimentations a été construit avec un groupe de travail composé de managers de services représentant toutes les directions qui avaient l’engagement de représenter leurs collaborateurs (et d’échanger régulièrement avec eux pour s’assurer de l’alignement avec les besoins exprimés lors du challenge). Plusieurs itérations ont eu lieu avec les autres managers et les membres du comité de direction élargi. 

J’ai tenu aussi à ce que les convictions personnelles et représentations individuelles ne prennent pas le pas sur le respect des attentes collectives et des expressions des agents. Je me le suis d’ailleurs appliqué pour moi même n’étant pas forcément un farouche partisan de la semaine en 4 jours pour une grande partie de nos métiers! 

L’expérimentation est lancée maintenant depuis début janvier avec 104 collaborateurs, la majorité étant positionnée sur la flexibilité horaire. 

Nous faisons un point tous les mois avec les organisations syndicales et les managers des services concernés, avec des critères de suivi et d’évaluation pré définis et nous avons fait un premier bilan trimestriel plus complet avec baromètre salariés et managers (et même partenaires pour les métiers concernés). Nous avons pris le soin d’interroger aussi les collaborateurs des services concernés par l’expérimentation non volontaires pour identifier les impacts potentiels sur leur activité, leur charge, la cohésion et le collectif. 

Nous avons d’ailleurs décidé récemment d’élargir à d’autres services la possibilité de recourir à la formule 4 jours pour plus de représentativité. 

 

Pouvez-vous nous parler des retours ou des résultats préliminaires depuis la mise en œuvre de ce nouveau système ? Avez-vous observé des impacts sur la performance de service et le bien-être au sein de l’équipe ?

Julien Orlandini : Les résultats sont éloquents et très positifs! D’ailleurs beaucoup de salariés souhaitent rejoindre l’expérimentation et expriment leur frustration de ne pas y être. 48% qui ne s’étaient pas positionnés dans les services concernés aimeraient maintenant tester. 100% des agents concernés ont souhaité renouveler au bout de 3 mois. 

Le taux de satisfaction est de 94% avec 73% des salariés qui ont mis une note de 10/10. 

En tête des impacts positifs: la conciliation de vies pour plus de 90% d’entre eux mais aussi la qualité de vie au travail ressentie ainsi que la diminution du stress pour 85% d’entre eux. Les mots clés qui ressortent des verbatims: confiance, sérénité, motivation. Finalement tous s’en sont emparés, en dépassant rapidement une appréhension de départ de type vis à vis de leur manager ou de l’organisme: « est ce que je peux vraiment partir à 14h » ?

Trois sujets mériteront d’être encore suivis pour la suite: la charge de gestion et de plannings pour les managers de la relation de service, l’intensité liée à la durée quotidienne de travail pour certaines formules et l’impact potentiel sur les reports de congés. 

Clairement notre performance de service n’a pas été dégradée et a même été améliorée, même si il faut plus de recul pour éviter l’effet « placebo ». 

A suivre donc avec l’enjeu d’un nouvel accord pour une généralisation d’ici janvier 2025, au cœur de notre stratégie RSO, Impact 23/27 !