10 juin 2024

Rencontre avec Damien Ientile, directeur de l’Urssaf Caisse Nationale

 

 

Récemment nommé directeur de l’Urssaf Caisse Nationale, Damien Ientile, était de passage il y a quelques jours dans les locaux de l’EN3S afin de rencontrer et d’échanger avec la 63ème promotion. Il revient dans cette interview pour l’Ecole sur les enjeux, la nouvelle COG, les stratégies, les objectifs, ou encore les besoins en formation.

 

Quelle stratégie entendez-vous mettre en place pour concilier la performance du recouvrement et l’accompagnement des entreprises ?

Damien Ientile : Dans le cadre de notre nouvelle Cog 2023-2027, nous avons souhaité aller encore plus loin dans notre démarche d’ouverture et d’écoute, initiée il y a plusieurs années. Cette feuille de route, qui fixe les objectifs et moyens de notre organisation pour les cinq années à venir, place l’usager au centre de nos actions.  

Nous nous efforcerons de concilier toujours mieux la performance de la collecte des cotisations avec l’accompagnement des entreprises, car l’un ne va pas sans l’autre. Ces dernières années, nous avons intensifié nos efforts pour soutenir la trésorerie des entreprises par des mesures fortes de suspension ou de report d’échéances. Dans les années à venir, nous maintiendrons nos efforts de recouvrement tout en fournissant un accompagnement proactif aux employeurs et travailleurs indépendants confrontés à des difficultés conjoncturelles ou structurelles. Nous développerons par exemple l’envoi de plans d’étalement des cotisations automatisés lorsque nous détecterons des difficultés potentielles.  

Nous renforcerons également notre action dans la lutte contre la fraude, en particulier le travail dissimulé : notre objectif est de redresser 5,5 milliards d’euros en cinq ans ! Pour ce faire, nous allouerons des ressources supplémentaires, avec 240 postes supplémentaires dédiés à la lutte contre le travail dissimulé, soit une augmentation de 60 % de nos effectifs. Nous intensifierons le contrôle des situations complexes, en accordant une attention particulière à la fraude liée à la mobilité internationale et aux plateformes numériques. La mise en place d’un précompte des cotisations par les plateformes, prévue par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024, verra le jour d’ici 2027, permettant le prélèvement direct des cotisations sociales des micro-entrepreneurs par les plateformes.

En ce qui concerne l’accompagnement, nous renforcerons nos actions visant à sécuriser les pratiques des entreprises, en leur fournissant des contenus pédagogiques pour mieux expliquer leurs obligations, en organisant des visites-conseils pour les jeunes entreprises et en les informant sur le droit à l’erreur.  

Notre objectif est aussi d’offrir à nos usagers des services toujours plus performants et adaptés à leurs besoins. À cet effet, nous développerons des outils digitaux tels que le livechat et le voicebot pour renforcer notre disponibilité et au moins la moitié des appels téléphoniques bénéficieront d’un traitement du dossier posant difficulté à l’usager, dès ce premier contact. Nous élargirons également notre offre d’accueil physique. Nous intégrerons par exemple, les maisons France Services pour accompagner les particuliers employeurs et les auto-entrepreneurs dans leurs démarches.

Nous contribuerons enfin à la simplification administrative et à l’accès au droit en facilitant le transfert d’informations vers nos partenaires. Par exemple, nous partagerons les revenus des micro-entrepreneurs avec la CAF ou France travail pour simplifier leurs démarches. La fiabilisation des données déclarées par les employeurs (via la DSN) devient cruciale dans le contexte du développement de la « solidarité à la source », où les droits aux prestations sociales seront progressivement calculés à partir de ces informations.

 

Pour relever les défis de votre nouvelle COG, avez-vous d’ores et déjà identifié des besoins en formation spécifiques notamment pour votre cadres dirigeants et managers stratégiques ?

Damien Ientile : Pour relever les défis de notre nouvelle Cog, nos managers doivent être non seulement bien équipés mais également bien encadrés, et la formation représente un levier crucial pour assurer cet accompagnement de manière décisive.

 La formation vise deux objectifs principaux : d’une part, faciliter la compréhension des évolutions en cours, en en analysant les mécanismes et en identifiant leurs impacts sur notre service public. Cela englobe la compréhension des enjeux majeurs de la Sécurité sociale, ainsi que ceux des grandes politiques publiques telles que l’économie, l’emploi, la transition écologique, l’aménagement du territoire ou encore l’intelligence artificielle et le big data.

L’EN3S s’avère être un allié de taille dans cette démarche, en proposant une gamme variée d’offres de formation, dont voici quelques exemples :

D’autre part, la formation vise à renforcer les compétences de nos managers mais aussi à les accompagner dans l’exercice de leurs fonctions. Il est essentiel d’aborder ce sujet selon deux axes :

  • Renforcer les « soft skills » de nos dirigeants et managers stratégiques, en mettant l’accent sur les compétences comportementales, relationnelles et psychosociales, au-delà des compétences techniques.
  • Renforcer les capacités et réflexes nécessaires pour animer des équipes dans des organisations qui adoptent durablement une approche « hybride », combinant travail à distance et présence physique.

Ces besoins sont partagés par d’autres organismes de la Sécurité sociale. À cet égard, il est crucial de favoriser le partage d’expérience entre ces organismes. Par exemple, les ateliers de co-développement pour les dirigeants sont très appréciés des participants et méritent d’être promus activement.

Ainsi, c’est autour de ces grandes priorités de formation que nous devons concentrer nos efforts pour accompagner et renforcer nos dirigeants et managers, en lien direct avec l’ambition 3 de notre schéma directeur des ressources humaines 2023/2027, qui met l’accent sur le développement des managers.

 

Lors de la journée APS du 12 mars, durant une interview pour l’EN3S, vous avez identifié, comme facteurs d’attractivité des métiers de la Sécurité sociale, le sens du service public et les valeurs portées par l’Institution. Que mettriez-vous plus spécifiquement en avant pour la branche recouvrement ?

Damien Ientile : L’Urssaf est au cœur du système de protection sociale français. Le sens profond de notre métier quotidien, c’est de financer la protection sociale du plus grand nombre, quoi qu’il arrive. C’est aussi de garantir aux salariés et aux indépendants l’exactitude des droits qu’ils acquièrent par leur travail et leurs cotisations. C’est enfin d’être les partenaires de l’activité économique.

Au sein de notre réseau, nos 16 000 collaborateurs contribuent à divers domaines tels que les relations avec les usagers, l’informatique, les finances, le conseil, l’expertise juridique, le contrôle, la gestion de la trésorerie et bien d’autres encore. Chaque année, nous recrutons plusieurs centaines de collaborateurs (1 200 en 2022) aux profils variés : des inspecteurs pour lutter contre la fraude, des experts en informatique pour innover constamment et fournir des outils répondant à notre mission d’accompagnement des usagers, ainsi que des conseillers offre de services pour répondre aux besoins de tous nos publics.

En rejoignant l’Urssaf, chacun s’investit pour le bien commun. Concrètement, travailler à l’Urssaf c’est :

Faire partie d’un collectif qui s’engage : Nos collaborateurs sont profondément attachés à leur mission de service public. Chaque jour, nous accompagnons nos 12 millions d’usagers dans leur diversité, de la grande entreprise au particulier employeur. Nous répondons à leurs questions, nous les aidons à traverser les difficultés qu’ils peuvent rencontrer, nous fiabilisons leurs droits. En interne, nous œuvrons pour promouvoir l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes en termes d’évolution, de parcours et de rémunération, ainsi que le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap, le soutien à la parentalité, l’emploi des seniors.

Placer l’écoute et le dialogue comme moteur de notre action : c’est vrai dans notre relation avec nos usagers, mais c’est aussi ce que nous souhaitons offrir à nos équipes. Un cadre de travail à la fois ouvert, agréable et épanouissant. Télétravail, droit à la déconnexion, formation… Des actions sont mises en œuvre sont mises en place pour favoriser le développement des compétences et garantir des conditions de travail respectueuses du bien-être, en équilibrant vie professionnelle et vie privée.

Évoluer dans un environnement dynamique avec des projets stimulants et d’envergure : L’Urssaf offre un environnement dynamique, sur tout le territoire métropolitain et outre-mer, où nous encourageons l’initiative, l’expérimentation et l’innovation numérique. En étant ouverts à notre environnement, nous adoptons de nouvelles méthodes de travail et stimulons l’innovation interne. Nos collaborateurs ont l’opportunité de travailler sur des projets d’envergure, en collaboration avec de nombreux partenaires.